http://amb.boudet.perso.sfr.fr/silence/silenceschlee.htm
Valérie Schlée
défaits les champs au terme de l’âpreté du jour éloge des dernières âmes tandis que blesse la comédie du monde déjection des certitudes c’est un point dans la fixité de l’instant le regard y imprime son oscillation des rouleaux sur le chemin un pur délice infiniment viscéral la subtilité de ce qui vient lacère des traces si fines qu’elles pénètrent tous les gémissements forment un lac inaugural, en un fragment salé dans la lumière pire, celui, ne plus le voir des murs coule du lait de chaux mais le sang comme fleurs qui trompent silencieuses, définitives, traversières dans cette position, démentir à l’envers d’un miroir noir : on ne servira plus l’image |
une chèvre sur une pierre tombale le vent dans les mots suspendus les arbres détachés et l’olivier et la croix le corps parle à la déraison soustraire le visage hors du commun ne pas mettre le feu aux étoupes pousser les bras ouverts dans un espace vierge au-dessus du cimetière à quoi on tient encore avec la chaleur en soi et le mot voyage dans la terre du corps approcher celui endormi nous ne nous appartenons pas entre la bouche et le silence un désir vient l’image disparue ne pas douter le langage habite celui qui n’a pas de nom la main sous la peau ouvrira une vallée une rivière puissante, la porte et un arbre le silence en soi un galet dans le tremblement de la frontière l’exil insoumis dont l’œil écoute ce qui se joue dans le jardin derrière le rideau de l’ordre la bouche entre ses mains la dilatation des mots presse le silence ils surgissent là, dans le chant échappé tout ce que la déviance rate tout ce que la camisole berne engloutis dans l’inaudible se fonder dans le déliement jusqu’à l’irréductible séparation Extrait de Le silence en soi un galet © éditions Potentille |
j'ai avalé un oiseau
publié dans la revue Décharge
n°152 (2011)
extrait :
ô j’ai
avalé un oiseau ô
j’ai ô
avalé un oiseau
ça crisse
dans mon ventre
le
silence s’y frotte
aïe
l’oiseau aïe
ton bec
kaléidoscopique
pique-moi
l’oiseau j’aime ça
j’ai
avalé hé j’ai hé avalé un oiseau
c’est ô
c’est quoi ces farfouillis
tes ailes
ô l’oiseau tiens tes ailes
l’oiseau
je serai ton désert
t’es
chaud l’oiseau ô
dis où tu
vas comme ça
quand tu
ne bouges pas
ça fait
plein de sourires autour
et une
grande plaine
t’es où ô
l’oiseau
tes pattes
frisottent dans
la
poussière primordiale
ne pas
tousser khkh
que tu ne
sortes pas froissé
te donne
mes cheveux l’oiseau
pour le
nid des froidures et les étés gelés
c’est
curieux d’avaler un oiseau kwhe
kwhe
déplisse sa queue
à ma
mouillure que ne puisse le saisir
ma main
l’accompagner
l’oiseau
kwhou un coup de bec
c’était
kwhou coup de beauté
je nous
sers un thé l’oiseau
un vert
japonais
estampé l’oiseau estampé
prendre quelqu'un
dans mes bras
publié dans la revue Liqueur
44 n°44
extrait :
dans la chambre
un piano ouvre une scène
trois pépins de citron dans le thé
des tas de portées dans la tête
pour une mélodie inaudible
on cherche une main contre le mur
en glissant la sienne au passage
ouvrir la porte sans savoir si derrière
disposé à l’apparition
du parvis regarder les rues désertes
les yeux rivés aux pavés glissants
si on lève la tête à l’instant mais que dure
ce temps sans voir sans savoir
trois pépins de citron dans le thé
des tas de portées dans la tête
pour une mélodie inaudible
on cherche une main contre le mur
en glissant la sienne au passage
ouvrir la porte sans savoir si derrière
disposé à l’apparition
du parvis regarder les rues désertes
les yeux rivés aux pavés glissants
si on lève la tête à l’instant mais que dure
ce temps sans voir sans savoir
ne tient à rien
publié dans la revue Décharge n°141 (2009)
extrait
:
ne tient
à rien. ne sait pas écrire. ne prend pas de place. ne voit pas son ombre. ne
veut rien. ne donne à qui dans l’infâme. ne bouge plus. laisse venir. plus loin
ailleurs le zigzag. une génération étrangère. ce qui se cherche dans les coins.
oppose ses mouvements. n’hésite pas. va de l’autre côté. ne revient jamais en
arrière. ne laisse que peu de vide. mange l’espace. l’infime et l’infini se
rejoignent. corps et graphie. sein barbotant. balbutiements. ne cessent plus de
dire. sans écho. dressent un alphabet illisible. sous la terre. dans
l’invisible.
Toute l'histoire de mon
corps
publié dans la revue
N4728 n°15 (2009)
extrait :
dans une encoignure
du corps
c’est le mouvement interne seulement
mieux en l’intérieur et la pliure
ça cogne hors limite
c’est par dessus bord sans moi
ne rien voir surtout de l’autre côté
dans l’ombre enroulée toute
c’est le souffle inverse immiscé
le pli et les fibres de l’usure
ça vient du rivage de l’autre
c’est la plaie toujours recommencée
dehors cisaille et la fente
dans le grès du regard
c’est la main le déploiement
passe à travers où
c’est le mouvement interne seulement
mieux en l’intérieur et la pliure
ça cogne hors limite
c’est par dessus bord sans moi
ne rien voir surtout de l’autre côté
dans l’ombre enroulée toute
c’est le souffle inverse immiscé
le pli et les fibres de l’usure
ça vient du rivage de l’autre
c’est la plaie toujours recommencée
dehors cisaille et la fente
dans le grès du regard
c’est la main le déploiement
passe à travers où
il faudrait se quitter
tous les jours
publié dans la revue Liqueur 44 n°77/76 (2007)
extrait :
je sais très bien
d’où je viens
sans doute je ne sais pas aimer
aujourd’hui mes mains sont vieilles
le bruit de la mer m’étouffe
le soleil rapièce les possibles
l’écume dans le vent frissonne
mes chaussettes montent à mi-cuisse
il faudrait aller marcher
tu es là et tu n’es pas là
les lames du parapet sifflent
un air simple souvent le même
il fait chaud sur mon visage
les yeux éblouis je ne te vois pas
je tousse l’amertume en solitaire
une femme passe avec un enfant
un phare clignote dans ma tête
ce soir son double me fera signe au large
je ferme les yeux une mouette regarde
elle attend que je ne penche plus
les ombres rétrécissent le monde
je pense à l’amie sous le climat continental
à sa soif immense de l’écume
du soleil blanc sur le mur
mes cheveux derrière mes oreilles se reposent
une voiture descend la côte rocheuse
il faudrait partir maintenant
je chante india song en sourdine
je ne t’entends plus vraiment
tu m’as enfermée sur le balcon
les mimosas sont à l’intérieur
mon dos est froid contre le dossier
un camion citerne roule en contre-bas
cela alourdit l’espace
une foulque sur l’eau vadrouille
un chien se laisse pousser par le vent
il avance par bonds comme un crabe
des mots abstraits me traversent
il y a ceux qui portent des lunettes de soleil
celles dont les yeux brûlent je les désire
je vais leur dire qu’elles sont belles
si j’ose si je peux je les embrasse
mais là je suis seule mes yeux sont nus
la rosace de l’église me donne le tournis
il faudrait s’empêcher de voir
sans doute je ne sais pas aimer
aujourd’hui mes mains sont vieilles
le bruit de la mer m’étouffe
le soleil rapièce les possibles
l’écume dans le vent frissonne
mes chaussettes montent à mi-cuisse
il faudrait aller marcher
tu es là et tu n’es pas là
les lames du parapet sifflent
un air simple souvent le même
il fait chaud sur mon visage
les yeux éblouis je ne te vois pas
je tousse l’amertume en solitaire
une femme passe avec un enfant
un phare clignote dans ma tête
ce soir son double me fera signe au large
je ferme les yeux une mouette regarde
elle attend que je ne penche plus
les ombres rétrécissent le monde
je pense à l’amie sous le climat continental
à sa soif immense de l’écume
du soleil blanc sur le mur
mes cheveux derrière mes oreilles se reposent
une voiture descend la côte rocheuse
il faudrait partir maintenant
je chante india song en sourdine
je ne t’entends plus vraiment
tu m’as enfermée sur le balcon
les mimosas sont à l’intérieur
mon dos est froid contre le dossier
un camion citerne roule en contre-bas
cela alourdit l’espace
une foulque sur l’eau vadrouille
un chien se laisse pousser par le vent
il avance par bonds comme un crabe
des mots abstraits me traversent
il y a ceux qui portent des lunettes de soleil
celles dont les yeux brûlent je les désire
je vais leur dire qu’elles sont belles
si j’ose si je peux je les embrasse
mais là je suis seule mes yeux sont nus
la rosace de l’église me donne le tournis
il faudrait s’empêcher de voir
derrière la
ligne
publié dans la revue Brèves n°77 (2006)