Depuis avril 1990, Colette
Deblé dessine à partir de diverses représentations de la femme dans
l'histoire de l'art afin de composer un essai plastique visuel de plus
de 2000 dessins.
"A-t-on jamais tenté
d'explorer par des seuls moyens plastiques l'histoire de l'art ou l'un
de ses aspects, comme le font l'historien et l'essayiste à l'aide de
l'écriture. Mon projet est de tenter, à travers une infinité de dessins,
de reprendre les diverses représentations de la femme depuis la
préhistoire jusqu'à nos jours afin de réaliser une analyse visuelle des
diverses postures, situations, mises en scène."
Depuis la première série, de nombreux auteurs ont participé à enrichir cette collection, parmi lesquels Jean Baudrillard, Michel Butor, Jacques Dupin, Bernard Noël, Christian Prigent, Jean-pierre Verheggen...
la main dénude l’oubli
histoire
de chacune
valérie schlée
pour quatre cahiers de
Peauésie de l’Adour
de Colette Deblé
janvier 2012
dans le corps de la langue
au centre ce qui se tient
l’éclatement des fibres
la source dressée soudain
ce que l’on boit de l’histoire
de chacune
descend et se pose
en volume évasé
plus lisible, à propos
la rencontre toujours
recommencée
si on avance
se hisse une femme
le souffle encore
ne s’entend pas
les vibrations pourtant
quand le corps respire
et se tait
écoutant, vigilant
le ruban de corps vierge
à chaque fois
c’est palpable
comme l’odeur
d’une femme disparue
ploie, dispute la veine
ce qui s’écoule
presque à toucher le rouge
clair du sourire
quand un éclat surgit
ponctue, tient le chant
la belle renoue ses promesses
de début de monde
cendres du parcours
lignes tremblées
entamer la valse
d’une respiration
commune
au balcon des yeux
se déroule la langue
en danseuse les pieds
sur la pointe tendent un fil
à la verticale, traversée
ligne après ligne
franchissent la douceur
dans les corps réconciliés
on s’y engage
la mouillure du tracé
les éclaboussures
de l’ombre où se reposer
le renversement du lieu
où siège la mémoire
de la peau, là où
tout se tient
corps après corps
lettre après lettre
le vent dessus dessous
un œil médian fixe
l’apparition
une main caresse
suspendue, en gouttelettes
impose la pensée juste
pluie sidérale
la femme debout
toute l’histoire dépareillée
se trame, dévide un récit
la relation se tisse
se vêt de ce que
les esprits déploient
une parole nourrie
d’une vendange ancienne
ce qui se tient dans la main d’une femme
les broussailles dans le galop de l’âme
à bout portant, ourle la peauésie
débraille la mémoire
passe la main, dénude l’oubli
saisit la poignée de la survivance
et s’embarque vers ce qui continue le lien
la lumière passe sur la peau tendue
toute la suie du temps dans les robes
dans le corset de l’histoire
la femme se penche et parle
des mots imprononçables
glissent des mains
à l’envers de l’alphabet
au buvard de la fatigue
triomphe l’élan
le corps avance sans détour
la langue haletante
se courbe en sauvagerie
la peau en partage
s’enchevêtre un dialogue
un pli dans la paume
restituant un sens perdu
l’embellie donne sa part au vivant
la chaleur d’une robe dans l’appui
deux bras avancent
vers la certitude d’exister
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