Samedi 19 avril à 10h30 à la librairie
Rencontre-discussion avec Elie Treese
« Les anges à part » (Rivages)
Lecture par Valérie Schlée.
Article de
l’Humanité par Muriel Steinmetz jeudi 6 Février 2014.
En mettant en scène un groupe de cinq à six garçons et
une fille, âgés d’à peu près douze ans, Elie Treese décrit un monde qui n’est
pas encore touché par le désir et la perte.
Elie Treese
enchante. Il s’empare du sujet de l’enfance avec doigté. Rien de mièvre dans
ses mots. Le romancier met en scène, sans avoir l’air d’y toucher, une bande de
jeunes, cinq à six garçons et une fille, âgés d’à peu près douze ans. Il les
cueille à cet instant précis, véritable entre-deux, où l’enfance qui est là
depuis pas mal de temps a, en somme, ses habitudes et ses enchantements, juste
avant que n’intervienne la césure de l’adolescence. Ce temps-charnière,
fragile, tendre, est celui où le corps ne pèse pas plus que ça mais où les sens
sont de plus en plus en éveil.
Cette bande,
composée entre autres de Franck, des jumeaux, de la Buse, de Carabi le dernier
venu, toujours vêtu de blanc, ainsi que de l’Oiseuse, au corps éblouissant,
pour jouer et réfléchir l’après-midi, a élu domicile dans une maison en ruine
où le lierre dévore les murs et où la porte d’entrée, intacte, ferme avec une
clé ; cabane améliorée au plafond défoncé où le ciel impose
son bleu comme en rêve. « On a du mal à croire que c’est vrai,
écrit l’auteur, on a du mal à croire que c’est bien ici, parce que Maison-Neuve,
ça sonne surtout comme une sorte de mensonge. Et d’ailleurs, il y en a qui
disent plutôt la Maison-brûlée-en-haut-du-champ, ou encore la
Maison-explosée-de-partout, mais la plupart préfèrent Maison-Neuve. » Ils passent là le plus clair de leur temps. Franck nettoie la poussière
que Carabi ne veut pas perdre : « Ouais, moi j’aimais mieux avec la poussière, et dans un
sens, la poussière, ça permet de se rappeler des choses simples, comme le
fait qu’on n’est pas grand-chose. » Ces enfants
mi-anges, mi-démons parlent un langage de grands avant la lettre. Des grands
non encore souillés par les désillusions, par l’appel de l’autre et du désir.
Ce qui sort de leur bouche n’est que pure vérité. Lorsqu’ils se fâchent et se
battent, ça ne dure jamais très longtemps car le monde extérieur les happe
avant, avec ses distractions permanentes : la pluie est
un cadeau et la lumière qui court sur les feuilles d’un arbre force
l’oubli. Ils n’ont aucun ressentiment. Ce sont des natures vierges. Jusqu’au
jour où…
Fils d’un
Américain, Elie Treese aime Faulkner et Beckett. Il réussit le pari un peu fou
d’un récit à la fois très dense et très mince dans une rare économie de mots.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire